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Affichage des articles du 2023

Rêver

 Je suis celle qui meurt d'anxiété chaque  jour, qui gère son quotidien au quart de tour. Qui tente de tout prévoir,  déjà terrorisée de s'imaginer veuve dans quarante ans.  Je suis celle qui ne voulait pas passer sa vie dans la banlieue de son enfance, mais qui y a pourtant une maison.  Je suis celle qui, dans l'année à venir, se lancera vers ailleurs, pour l'unique raison que "Pourquoi pas?".  Cette audacieuse personne en moi me terrorise.  Je ne sais pas si elle prend la pleine mesure du saut dans le vide qu'elle s'apprête à faire. Il a donc l'angoisse de l'échec, des deuils, et cette irrépressible envie de renouveau,de se choisir, enfin, un lieu de vie à la hauteur du rêve. 

L'étrange chemin caboteux de la vie

 Je n'ai plus, dans ma vie,cette amie à laquelle je confiais tout. J'en prends la pleine mesure depuis les derniers mois, et plus encore dans ces jours festifs, où je dois me souvenir qu'il ne me faut plus la contacter, que le lien n'est plus.  Pourtant, même  si iels ne sont plus présent.e.s dans mon existence,  les gens continuent d'habiter mes pensées.  Alors, je ne peux m'empêcher de me demander comment elle va, de songer à elle,aussi, lorsque dans le bain, mon nez torturé par une récente grippe, sème du sang dans la baignoire, rendant mon moment de détente plutôt dramatique.  Elle aurait aimé la théâtralité de la scène,  les gouttes d'eucalyptus perdues dans une marre d'eau couleur rouille, ma panique à la vue du sang, à ne pas trouver toute de suite l'origine de sa fuite. J'en reviens à qui j'étais enfant,ou adolescente.  Lorsque j'avais peu d'ami.e.s, que les livres faisaient office de compagnons de route. Avant la vingtaine et

Sept

 C'était il y a 7 ans. À six heures du matin, tandis que je décidais de prolonger mon sommeil, ne voulant pas encore affronter le jour, toi, tu décidais d'en finir avec la vie. Tu hissais ta corde à la structure du cabanon,  tu sortais tout ce qui encombrait l'endroit, tu préparais les noeuds qui allaient à jamais te couper de nous. Lorsque le téléphone a retenti un peu plus tard ce matin-là, que maman m'a demandé si j'étais bien assise, comme si elle craignait que la nouvelle me projette violemment au sol, l'annonce redoutée a éclatée.  Tu t'étais pendu, faute d'espoir pour ton futur à venir.  Je t'en ai voulu, de ne pas avoir laissé de notes à mon intention, autant que d'avoir choisi de partir ainsi, abdiquant des défis, et tout à la fois des moments tendres que tu aurais pu vivre. Je t'en veux encore.  Tu aurais pu voir mon garçon, aujourd'hui, fier de maîtriser la planche à neige. Tu aurais pu jaser avec ton frère, échanger de grandes

Merci, Karl!

 Comme beaucoup, j'ai été frappée par la nouvelle du décès de Karl, des Cowboys Fringants. Un drame de plus dans une période déjà fortement éprouvante.  J'aurais aimé découvrir leur musique plus tôt.  C'est vers 18 ans,à l'heure de mes premières manifestations, que j'ai pu entendre les airs de leurs chansons, entonnés en choeur sur des bancs de bus en chemin vers Québec,  tandis qu'on se rendait à une énième contestation.  C'était beau,et puissant, beaucoup plus rassembleur que l'internationale communiste, chantée par des" camarades" qui se prenaient trop au sérieux.  Ensuite, ce fut lors de mes passages chez mes parents en banlieue, tandis que j'avais emménagé dans la grande Montréal.  Dans l'incapacité à communiquer le vrai des émois entre nous,leur musique faisait un pont entre mon coeur et celui de mon père.  Un point commun et un langage pour dire les injustices sociales.   Après son décès, en découvrant bon nombre de pièces musica

Madame

 Madame, c'est le titre maudit, celui qui trahit que j'ai réalisé bien peu des choses dont je rêvais adolescente.  Je m'imaginais que,Madame devenue, j'aurais fait le tour du monde, serais devenue évidemment écrivaine, récitant du Nelligan sur un voilier que j'aurais bâti de mes mains. La Madame actuelle, elle travaille, s'entraîne, tente de gérer les tâches domestiques diverses et d'être présente auprès des enfants, lit lorsqu'elle le peut,mais beaucoup moins fréquemment que souhaité lorsque son esprit est paralysé par la gestion des achats des vêtements d'hiver et l'idée de prévoir des mitaines de plus pour la saison froide à venir. On m'a montré, dans les derniers jours,des photographies de moi à vingt ans. J'étais là, souriante,un chapeau de paille multicolore sur la tête, des jupes colorés et follement joyeuse.  J'ai vu cette jeune femme, et m'en suis sentie nostalgique.   La Madame veut faire rejaillir un peu de la jeune fem

Mon angoisse littéraire

 Une heure de sommeil de plus. Un réveil horrible, au sortir d'un cauchemar : La bibliothèque me traînait en justice pour avoir trahi une règle des bon.ne.s usager.ère.s : ne pas abîmer un bouquin. Ça m'est arrivé trois fois en cinq ans. Grosse et triste moyenne.  Une fois,c'est mon chum qui avait oublié le bouquin dans les poches surdimentionnés d'une robe de chambre de spa.  Disparu, donc,à la fin de la journée. Ça m'avait profondément angoissé, et mis en rogne. Je n'avais même pas commencé à le lire. La deuxième fois, c'était en chemin vers Rivière-du-loup, alors qu'on partait faire un roadtrip pré-déménagement. Une bouteille d'eau mal fermée s'était déversée sur un livre,qui gondola aller-retour. Culpabilité.  Tristesse.  La troisième fois, c'était une flaque de jus Halloweensque qu'avait concocté fiston,avec de gros vers de terre en jujubes très mous et gorgés de liquide, après avoir passé la journée au frigo. J'avais lavé la tab

Ingérence

 Le soleil se lève à peine, Que les enfants font la file À l'arrêt d'autobus  Je savoure le bonheur  De ne pas être en retard  Les miens sont habilés Correctement pour la saison  Personne n'a fait de crise Contre  manteau et mitaines Puis,elle m'interpelle  Dans sa voiture stationnée -Madame  il faudrait gérer cela! -Quoi donc? -Le petit gars,là-bas,il attaque la petite fille! Je me retourne,parce que prise en faute Et je ne vois pourtant  Que le frère et la soeur qui rigolent,se chamaillent gentiment  -Je ne comprends pas,il semblent s'amuser... -Il fait les avertir, voyons ! -Allez-y, si c'est important pour vous! Je m'occupe de mes propres enfants, et ces autres-là me semblent plutôt consentants . - Je peux pas,je suis en voiture !J'ose pas imaginer comment vous éduquer vos enfants ! Il n'est même pas sept heures trente Que déjà, Madame, vous voulez encadrer Les jeux de deux enfants qui ne vous ont Rien demandé Je n'en veux pas,de votre insign

Il y a

 Il y a cette fillette Qui disait sien le chalet familial  Qui s'appropriait le Rocher Percé Et dessinait au noir tableau d'ardoise  Les plus grands des bals d'oiseaux  Il y a cette jeune femme  Qui se languissait des marées Qui n'aurait pourtant jamais osé Troquer la ville,filer loin  Au bout de la 132 Il y a cette trentenaire  Presque bientôt quarante ans Qui voit les autres faire maison Dans leurs rêves élémentaires  Et puis,pourquoi pas? Pourrait-elle, elle aussi Laisser la banlieue à son asphalte  Laisser les peurs en arrière  Et faire de la plage son salon Cueillir le varech à pleines mains Se réinventer des saisons 

Les algues du paradis

 Je n'aurais pas cru Pouvoir être une fille de fleuve Moi qui ne jurais que de la mer et ses marées Mais quelque chose s'est enclenché  Là où, avant, il n'y avait qu'un bref arrêt, une petite pause au trajet  Nous avons choisi de nous amarrer  Il y avait le froid qui gèle les phalanges Il y avait les algues qui craquent  Et le calcaire qui s'effrite  Il y avait la pluie,lourde, qui dardait son territoire sur l'eau comme la terre Et surtout, il y avait nos coeurs qui chantaient enfin

Cheap poésie lubrique

 La libido Plus dense Que le smog À l'orange ciel de Montréal  Mon corps roule De vagues déferlantes  Et s'échoue de libération  Lorsqu'enfin Je l'honore Il faut plus d'imagination  Plus de doigté Plus de batterie dans les jouets Déchargés Il faut prendre soin de soi Éclater de bonheur  Et jouïr  De La Solitude 

Jour de pluie

 Je marchais d'un pas rapide Veillant à ne pas m'éborgner Sous le parapluie brisé Les oiseaux chantaient fort Personne ne leur avait dit Qu'aux jours gris, L'âme est morose Je marchais d'un pas rapide Des idées folles et des projets  M'éclaboussaient les pieds

Je pourrais

Écrire pour espérer mieux comprendre  Les culpabilités d'hier qui reviennent dans le sommeil Libérer les souvenirs  Leurs redonner corps par les phrases Prendre celle que j'étais par la main Lui donner un peu d'amour  Avant de la laisser mourir

Jour de fête

 Aujourd'hui, c'est jour de fête Et pas seulement parce que j'entame une nouvelle barre de savon Bio J'ai couru avec plus d'aplomb ce matin Les corneilles me clignaient de l'oeil, complices Il y avait beaucoup de garnotte Je m'y suis même pas enfargé Un vrai beau début de journée Et je clame à présent L'ode à l'autosuffisance J'en ai assez d'attendre Après lui Pour être vue, pour exister J'ai décidé (encore plus qu'hier) De m'aimer pour deux J'aurais tendance à souhaiter d'autres yeux, d'autres sourires Espérer un nouvel amant Pour me sortir de l'engourdissement du mariage Mais non, ce ne serait que pâle illusion Je dois kiffer assez ma propre personne Pour m'autosuffire Caresser ma peau, mon âme et mon futur Comprendre que même accompagné On demeure en soi une entité Aujourd'hui, c'est jour de fête Et je ne ME décevrai pas

Matin d'avril

 Faudrait aller jouer dehors Le bleu du ciel invite les yeux à la baignade Les petits courent dans le corridor  Un trop-plein d'énergie habite leurs corps J'aurais aimé rester au lit Après tout c'est dimanche  Lire et écrire toute la journée  Le dimanche je me m'entraîne pas Et je me suis abstenue Du sirop d'érable dans mon décaf J'essaie d'être une mère exemplaire  Que les petits appeleront par choix et non  Par obligation  Mais pendant ce temps  Ma plume prend la poussière 

J'avais oublié

  J'avais oublié le doux bonheur de jouer en famille Le froid joyeux qui chatouille les joues La neige accumulée au capuchon Lorsqu'on descend très vite les grosses côtes Les enfants savourent la magie Espèrent encore une fois être portés Tirés encore jusqu'en haut Pour vite filer encore,encore! Juste une dernière glissade avant de rentrer Passé la porte, les bottes s'emmêlent Quelques unes sont encore prisonnières  Des pantalons de neige mouillés On a froid, soudainement Ou ce sont les souvenirs qui nous appellent Qu'importe, déjà, le lait au chocolat est sur le rond du poêle On y mettra des guimauves, encore plus de guimauves   Pour creuser dans nos coeurs Les douces mémoires de la relâche

La tête sous l'eau

 Y'a peut-être quelqu'un qui fait du vaudou avec une poupée à mon effigie, ou je me suis lancée un mauvais sort en souhaitant ne pas vieillir.  Bref. Un otite aiguë.  Double. Deux douleurs lancinantes aux oreilles,  l'impression que ma tête héberge une chute d'eau constante, que des masses d'eau éclatent sur mes tympans en continu. Après quelques jours, j'ai finis par voir une médecin  et débuter la médication.  La douleur diminue, ma tête se remet à bouger. Reste qu'une douleur du genre,  c'est pire que mes souvenirs d'accouchements. Il reste, toutefois,  ce bruit continuel, comme si je vivais chaque minute la sortie d'un bar achalandé aux aurores matinales. Y est ajouté un petit Poc Poc occasionnel,  qui s'arrange pour que je n'oublie pas que mes tympans pourraient éclater. 10 jours de traitement, 10 jours à tenter de ne pas angoisser de rester à vie avec cette condition. 10 jours,sans doute, à faire de la recherche sur le sujet, pour m

Je voudrais

 Je voudrais pouvoir écrire et lire plus fréquemment, battre des records de piles de bouquins lus, avoir la tête pleines de nouveaux personnages et de récits colorés.  Je voudrais plus d'entraînements sportifs, toujours plus pour des abdominaux découpés,des cuisses de fer et de jolis biceps. Je voudrais du temps pour jouer avec les petits, construire des châteaux enneigés, leur raconter des histoires jusqu'à ce que tous les livres de la maison y soient passés. Je voudrais faire la sieste aux côtés de Batman et de Wonderman, lorsqu'ils s'assoupissent après avoir joué longtemps, longtemps, aux super-héros.  Je voudrais être une amie présente,  qui sait prendre le temps d'arroser les liens si chers à son coeur. Je voudrais être une amante inventive et dévouée,je voudrais allumer son corps par ma seule présence. Mais,  le quotidien est un étau et je peine à garder le dos droit et les yeux grands ouverts. Chaque jour est une course pour accomplir un peu plus.  Et,ce n