J'avais même pas peur.
Pas une miette. Pas fait de Test Pap depuis trois ans, puisque la vie, le même partenaire depuis des lustres, les enfants, et aucun médecin officiel.
Vous recevrez un résultat par courriel.
C'était presque une réjouissance, j'allais recevoir autre chose qu'un énième avis de l'école de Grand Garçon concernant les rhumes, gastroentérites et autres réjouissances.
J'avais même pas peur.
Mais hier, la sonnerie du téléphone a résonné à l'heure du souper, tandis que je gérais la préparation culinaire de deux sortes de protéines, la vie ne m'ayant pas doté d'une progéniture aussi végétarienne que moi.
Je n'ai pas répondu, pas le temps.
J'ai revérifié ensuite, par contre.
Un appel de la clinique gynécologique. Oups.
Sans doute une formalité, on ne laisse pas de message concernant la santé des patients. Tout de même, je n'ai pas attendu trop longtemps avant que l'anxiété vienne sonner, elle s'est imposée sans enlever ses bottes dans l'entrée.
Je ne sais pas comment se sentent les gens qui reçoivent un diagnostic de cancer ou de maladie incurable. Mais sans que je sache trop comment, je me suis retrouvée à passer la soirée à sangloter, imaginant que je vivais sans doute mes derniers instants en tant que femme en santé.
Et j'étais pas prête. Parce que j'ai une famille que j'aime et qui m'endure bien. Parce que j'ai beaucoup trop de projets créatifs en production. Parce que ma pile de lectures est vraiment trop inspirante et que je ne pourrais jamais mourir avant d'en être venu à bout.
J'ai pris toute ma petite monnaie de courage ce matin pour recontacter la clinique:
-Bonjour. J'ai reçu un appel hier, mais je n'ai pas pu y répondre. Auriez-vous mes résultats?
-Oui, Madame. La gynécologue a tenté de vous joindre sans succès.
-Pourriez-vous juste me dire s'il y avait quoi que ce soit d'anormal?
-Non, Madame, je ne peux rien vous dire. Je peux dire à la gynéco que vous êtes disponible aujourd'hui.
-D'accord, oui, je serai disponible.
-Gardez votre cellulaire ouvert, vous n'êtes pas notre seule patiente.
C'était sans doute la procédure. Mais c'était glacial, et profondément anxiogène. Alors j'attends, le cœur prêt à éclater au bruit de la sonnerie qui retentira on ne sait pas quand.
L'anxiété est une copine qui m'accompagne toujours. Parfois, sa seule présence fait par contre germer un jardin de souffrance. Même l'automne, même si le froid a déjà terni les feuillus encore au jardin, elle remue ma terre intérieure et y plante d'affreux bulbes sombres et généreusement piquants.
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