Accéder au contenu principal

Sixième fois

 C'est la sixième fois que je vis cela.

Ton décès, encore.

Un anniversaire glauque, auquel j'essaie malgré tout d'ajouter de la lumière. 

J'ai allumé des bougies. J'ai voulu croire qu'on pouvait encore communiquer. 

Les enfants sont à l'école et le travail se déroule sans moi aujourd'hui. 

Je suis pleinement fille de toi.

Parce qu'on ne se remet jamais vraiment des hommes qui nous quittent.  Surtout pas toi, le premier,le père. 

Celui que je n'ai pas su lire, celui qui n'a pas su me comprendre. 

Je t'en ai voulu beaucoup, de tout.

D'avoir essuyé mes tristesses à coups de colère. 

D'avoir semé en moi la haine de qui je suis.

De m'avoir appris, malgré toi, à quêter l'amour dans les mauvais bras, à repousser les âmes belles, ne m'y croyant pas apte.

Je t'en ai voulu d'être toi, de ce que je croyais que tu étais. 

Avant de savoir. 

Que ta maladie grugeait ta douceur, qu'elle te rendait aigri et impatient, que pour avoir de l'emprise sur ton monde, tu devais éclater de cette haine,tu devais en répendre sur les murs pour espérer un sursis. 


Avant de savoir que tu serais seul à ta mort,seul dans ton choix d'opter pour une fin abrupte, un suicide d'homme fort qui se cache pourtant pour mourir,épuisé,meurtri,au bout d'une corde qui ne le retient plus à rien.


Alors, tandis que tu meurs pour la sixième fois, que je te pleure encore et encore,  j'en viens à me dire qu'il me faut vivre, intensément, crier mon existence, mes émois,mes douleurs et mes joies.

Jouïr fort de la vie, et jouïr fort aussi,que mon corps soit hymne de bonheur et d'orages,  vivre pour tous les suicidés qui ne peuvent plus s'emplir les poumons de cette folle aventure qu'est la vie.


Commentaires

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

Jour de fête

 Aujourd'hui, c'est jour de fête Et pas seulement parce que j'entame une nouvelle barre de savon Bio J'ai couru avec plus d'aplomb ce matin Les corneilles me clignaient de l'oeil, complices Il y avait beaucoup de garnotte Je m'y suis même pas enfargé Un vrai beau début de journée Et je clame à présent L'ode à l'autosuffisance J'en ai assez d'attendre Après lui Pour être vue, pour exister J'ai décidé (encore plus qu'hier) De m'aimer pour deux J'aurais tendance à souhaiter d'autres yeux, d'autres sourires Espérer un nouvel amant Pour me sortir de l'engourdissement du mariage Mais non, ce ne serait que pâle illusion Je dois kiffer assez ma propre personne Pour m'autosuffire Caresser ma peau, mon âme et mon futur Comprendre que même accompagné On demeure en soi une entité Aujourd'hui, c'est jour de fête Et je ne ME décevrai pas

Il y a

 Il y a cette fillette Qui disait sien le chalet familial  Qui s'appropriait le Rocher Percé Et dessinait au noir tableau d'ardoise  Les plus grands des bals d'oiseaux  Il y a cette jeune femme  Qui se languissait des marées Qui n'aurait pourtant jamais osé Troquer la ville,filer loin  Au bout de la 132 Il y a cette trentenaire  Presque bientôt quarante ans Qui voit les autres faire maison Dans leurs rêves élémentaires  Et puis,pourquoi pas? Pourrait-elle, elle aussi Laisser la banlieue à son asphalte  Laisser les peurs en arrière  Et faire de la plage son salon Cueillir le varech à pleines mains Se réinventer des saisons 

Ingérence

 Le soleil se lève à peine, Que les enfants font la file À l'arrêt d'autobus  Je savoure le bonheur  De ne pas être en retard  Les miens sont habilés Correctement pour la saison  Personne n'a fait de crise Contre  manteau et mitaines Puis,elle m'interpelle  Dans sa voiture stationnée -Madame  il faudrait gérer cela! -Quoi donc? -Le petit gars,là-bas,il attaque la petite fille! Je me retourne,parce que prise en faute Et je ne vois pourtant  Que le frère et la soeur qui rigolent,se chamaillent gentiment  -Je ne comprends pas,il semblent s'amuser... -Il fait les avertir, voyons ! -Allez-y, si c'est important pour vous! Je m'occupe de mes propres enfants, et ces autres-là me semblent plutôt consentants . - Je peux pas,je suis en voiture !J'ose pas imaginer comment vous éduquer vos enfants ! Il n'est même pas sept heures trente Que déjà, Madame, vous voulez encadrer Les jeux de deux enfants qui ne vous ont Rien demandé Je n'en veux pas,de votre insign